Ce jeudi, mon fils et moi sommes de sortie… ça tient du miracle, dégager en corner les amis, le réglage de la bande-son du dernier rap, un match à la télé et même la petite copine, yes ! C’est presque les yeux fermés qu’il me suit au concert. Il y a quelques années, nous avions l’habitude d’échanger pendant une semaine le cd préféré du moment, et ainsi baigner dans l’univers musical de l’autre. Alors, ce soir, c’est parti pour le grand bain de la semaine.
Rejoindre Divonne sans bouchon, cela aussi tient du miracle. Drôle de petite ville, un lac artificiel qui ne fait pas trop rêver, des rues larges, proprettes, à la Suisse, des villas sam’suffit – comme on dit -, de la verdure trop bien léchée et une immense bâtisse moderne qui abrite la salle de concert. Un supplément d’âme ne serait pas superflu.
Je retrouve Num, pull gris écharpe rouge, dit-il, qui lit, et nous faisons connaissance.
Après trois concerts de la Porte-Plume, dans des salles totalement différentes, je retrouve une disposition qui rappelle Nuithonie à Fribourg : salle pentue, avec plongée sur la scène. Et, à vrai dire, ce n’est pas la configuration que je préfère. Au Locle, nous étions posés comme dans le creux d’une cuiller, les yeux levés vers le décor, qui nous cueillait sans tarder. L’Echandole faisait la part belle à l’intimité et, là aussi, le décor happait littéralement les spectateurs. Douillet, chaleureux, enveloppant. Rien de tout cela à Divonne. Je dirais que le regard plongeant convient moins bien à la Porte-Plume.
La voix douce et forte d’Amélie nous embarque pourtant très vite dans une succession de saynètes et de tableaux que vous commencez aussi à bien connaître. Un fou rire maîtrisé le mieux possible sur les reprises vocales d’Olivier… je ne sais pas ce qui la faisait rire, mais je riais de la voir étouffer son rire. Comme je me sentais moins fondue dans le décor, j’ai porté plus d’attention à différents détails musicaux et scéniques. C’est une bien belle équipe qui nous a baladés ce soir-là, que de trouvailles dans les arrangements, une finesse dans le jeu. Le pic d’émotion est atteint avec le Citronnier, des chairs de poule ici et là, quelques larmes et les notes de Guillaume, à chaque fois plus pures et sensibles.
Des clins et des coups de coude complices avec Mathieu, qui sait déjà ce qui m’émeut et m’amuse. Derrière nous, un couple bien âgé, qui n’a pas ménagé ses commentaires à haute voix. Finalement, ils étaient touchants et touchés par la grâce d’Amélie. « Elle est encore bien dynamique ! » On les a regardés descendre l’escalier, se tenant par la main, gauches et mal assurés, ravis de leur soirée musicale et conquis par la fée. Nous aussi, nous étions conquis.
Le plus difficile, c’est de s’extirper de la salle, casser le fil, rompre l’harmonie. A deux, c’est mieux.
On rejoint Num qui nous dit en vrac ce qu’il a écrit plus haut, on parle concerts, musique et on attend Amélie. « Elle dort, elle est fatiguée. » Chut, « glissez, mortels, n’appuyez point », comme disait le poète, on sort sur la pointe des pieds.
Un repas fin pour fêter dignement cette sortie, refaçonnage du monde et rires jusque tard dans la nuit. J’aime bien sortir avec mon fils.
_________________ Tout recevoir et tout donner
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